Lettre de chevet
Ma mie, ma douce colombe, mon ange, phare de mes
songes, le trouble m'envahit, en ce jour, comme il l'a fait chaque
jour passé, depuis que vous reposez ici; tout du moins dans mon esprit.
Votre photo, bien que ternie par le temps qui passe, est semblable
aux fleurs séchées, les dernières que nous nous sommes offertes, que
je n'ai point remplacées, non pas par cupidité, mais par fidélité
à ce que nous pouvons ici bas offrir, et garder en nous. La comparaison
pourrait sembler point flatteuse, mais vous et moi avons traversé
tant d'épreuves, que je sais que vous sauriez saisir le sens de tout
ceci sans avoir à l'expliciter. Les rides que nous glanons sur le
chemin, les jouets qu'enfant nous triturons, usons, n'en méritent
pas moins attention. La beauté est autre qu'un simple reflet parfaitement
agencé, la beauté c'est la vie qui s'insinue en nous, avec son souffle
immuable de mort qui vous a emporté. Les deux font la paire, comme
des amants parfaitement accordés. Ainsi ces fleurs séchées sont pour
moi ce témoignage des instants qui se sont écoulés, qu'il fait bon
de garder gravé tout au chaud, au fond.
Mais vous, ma mie, toi, ma sincère amie, qui m'a laissé entrevoir
la lumière de ton âme à travers les failles de tes murs, si tu savais
comme l'image sculptée par les vagues de l'amour sur mon cour ne s'est
point délavée. Les sens sont restés éveillés, avec leur voile de félicité
prêt à m'offrir leurs eaux lorsque j'ouvre le robinet de tes souvenirs,
qui parfois émergent tout seul, au détour d'une rue, dans un coin
de bar, à la fenêtre de notre demeure. Lorsque mes éclats de songe
s'ouvrent, je te vois, je sens la fragrance de toi, des instants que
nous avons partagés, pour le meilleur et pour le pire. Ton sourire,
tes larmes, tes hauts les cours, tes silences, tes lumières, les fenêtres
de ton univers, ta voix, le timbre de tes sentiments, jusqu'au partage
de nos ébats, nos rires mélangés, nos larmes unies dans une même rivière,
le tam-tam de nos nuits, la symphonie de nos pensées, nos mots d'amour,
nos espoirs, nos rêves, consommés sur les rivages de l'ivresse étoilée.
J'aimerai pouvoir revivre ces instants, toi dans mes bras, nos battements
à l'unissons, nos cieux exprimant toute la profondeur, l'embrasement
de la source originelle, j'aimerai de nouveau pouvoir m'envoler avec
toi, par nos ailes unies sous le soleil de notre flamme. Même si je
peux le faire en m'allongeant sur l'herbe, et rêvant devant les étoiles,
la réalité de chaire était bien plus belle, alors, en attendant de
te retrouver dans l'au-delà, je me dois de prendre mon mal en patience
et, te rend hommage par cette lettre des cieux, puisse t'elle arriver
jusqu'à toi, puisse le vent céleste porter ma prière, mes mots, traverser
les valses de poussière d'étoile, et toucher la cible, fusse t'elle
abyssale.
Allongé sur son nuage par delà les plaines,
Les rivières, les montagnes, les océans,
Dans un lieu connu de lui seul, si ce n'est
Des dieux, un dormeur sans va poser haleine
Sa mie est partie depuis maintes lunes dans un autre temps,
Et hors de la "façon", il avait un grand besoin de rêver,
D'inspirer l'essence même du monde de ses pieds,
Trouver lieu où il pourrait baigner dans la lueur des astres
Ce lieu il l'avait trouvé après plusieurs voyages,
Au détour d'un volcan, aidé par une baguette magique,
Qu'un sourcier de nuages rêveurs d'albâtre
Lui avait prêté pour trouver de son fort le rivage.
Il y accéda en traversant une mystérieuse crique,
Recouverte d'une eau semblable à un miroir,
En y plongeant les cieux emplis de l'unique espoir,
De pouvoir à nouveau rentrer aux pays des songes.
Lorsqu'il fut entouré d'humidité en brouillard,
Comme si ses larmes intérieures s'étaient condensées,
Il s'allongea et observa un temps ce qu'il y avait
Au dessus de lui, les étoiles étaient là en divins phares.
Puis, il se pencha et regarda, regarda, vit s'étendre des ailes,
Vit les étendues de toutes les couleurs par lesquels
Il était passé, fut touché par toutes les beautés animées
Et inanimées qu'il n'avait su voir jusqu'à présent.
Allongé sur son nuage par delà les plaines,
Les rivières, les montagnes, les océans,
Dans un lieu connu de lui seul, si ce n'est
Des dieux, un dormeur sans va poser haleine
Il s'allongea en posant la tête en direction
D'un halo d'arc-en-ciel, dont il semblait
S'émaner de l'éther lorsqu'il fermait les yeux,
Plongeant, s'évadant au cœur de ses passions.
Il voyage maintenant hors du temps, au lieu
Des éternités, où il rejoint sa bien aimée,
Là où main dans la main ils vivent le partage
De Passion, de l'univers découvrent les milles rivages.
Il rêve les monts en sourire, d'elle tout ébahit,
Fleurs embrasées, dépapillote, plonge à l'essence de vie,
Devant tombe marbrée de souvenirs, le vent d'univers il suit.
A ma mie disparue,
Un vieux rêveur aux portes de l'outre tombe.
Pascal Lamachère©
4 mars 2004
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